1978-2014 : L’histoire de Mamadou Ndala que beaucoup ignorent…
Ce mardi 2 Janvier 2024, la nation congolaise se souvient de l’un de ses illustres fils, disparu tragiquement il y a de cela 10 ans, jour pour jour. Mamadou Ndala, puisque c’est de lui qu’il s’agit, alors colonel et Chef du 42e bataillon commando de l’Unité de réaction rapide, URR, des Forces armées de la République Démocratique du Congo, FARDC, a été tué le 2 janvier 2014 par un tir de roquette ayant visé son véhicule dans les environs de Beni, province du Nord-Kivu, peu après avoir quitté cette ville…
Mamadou Mustafa Ndala, dit Colonel Mamdou Ndala, né le 8 décembre 1978 à Ibambi, territoire de Wamba, dans la province Orientale, et décédé le 2 janvier 2014 au front, était en effet un colonel des FARDC, Héros de la guerre contre le Mouvement du 23 Mars, M23, soutenu par le Rwanda.
Vaillant, soldat bien entraîné par des instructeurs belges, angolais, américains et chinois, il était le commandant du 42e bataillon commando des unités de réaction rapide des FARDC. Il devient célèbre pour ses victoires écrasantes sur les combattants du M23, un mouvement rebelle qui sévissait à l’est de la République démocratique du Congo.
D’après plusieurs versions concordantes, Mamadou Ndala est mort dans une jeep avec deux gardes du corps le 2 janvier 2014, après une embuscade tendue par des rebelles ougandais des ADF Nalu, à 10 kilomètres de Beni au Nord-Kivu.
Mamadou Ndala était marié et père de trois enfants. Il a été inhumé à Kinshasa et nommé général de brigade à titre posthume.
Bio, parcours et faits saillants
Mamadou Ndala est né dans la province Orientale (anciennement Haut Zaïre) d’une famille musulmane, religion qu’il pratiquera jusqu’à sa mort. Il fait ses études primaires à Ibambi, et ses études secondaires à l’Institut Aiglon à Isiro, puis au complexe scolaire « Petits Anges ».
Passionné du foot et excellent jouer, il a évolué au sein d’African Sports, une équipe locale de football, qui s’est disloquée il y a quelques années.
Carrière militaire et exploits
Mamadou Ndala rejoint l’armée le 6 juin 1997. Quatorze ans plus tard, le 7 janvier 2011, il est promu au grade de colonel et prend le commandement du 42e bataillon commando des Unités de Réaction Rapide des FARDC.
Apres avoir mené, en juillet et août 2013, des offensives victorieuses contre les combattants du M23 qui assiégeaient la ville de Goma, il se fait immédiatement remarquer par la population de Goma, lassée par l’inertie des casques bleus de l’ONU et les moqueries des officiers de l’armée Rwandaise contre l’armée congolaise.
Et pour cause, l’armée congolaise avait habitué la population à des débandades ahurissantes, comme en novembre 2012 lorsque le M23 s’était emparé de la ville de Goma abandonnée par les forces armées congolaises. Trois mois plus tôt, le général rwandais James Kabarebe affirmait dans une interview avec journaliste belge Colette Braeckman, que l’armée congolaise n’était même pas capable de tuer un rat.
Les victoires des hommes de Ndala sont d’abord prises avec réserve par la population. Elle était pratiquement frappée par un mélange de ressentiment et d’humiliation, et surpris de voir comment les soldats s’imposaient sur le champ de bataille et présentant même les cadavres des soldats ennemis, réputés invincibles. Les combats sont rudes et le M23 enregistre de lourdes pertes.
Dans le même temps, le colonel Mamadu Ndala doit intervenir auprès de la population en colère contre la Monusco, suite à un ultimatum qu’elle avait donné au M23, suivi du rétropédalage. Le cailloutage par la population du convoi de la Monusco n’a pu se calmer que lorsque le colonel Ndala est intervenu auprès des habitants pour apaiser la situation et éviter ainsi tout retournement de la situation.
La population s’insurge contre une rumeur de son rappel à Kinshasa
A la mi-juillet 2013, en raison de rumeurs concernant le rappel du colonel Mamadu Ndala à Kinshasa, il y eut des violentes manifestations à Goma contre la Monusco et aussi contre le Président Joseph Kabila, que la population accuse de vouloir paralyser l’action de l’armée et du colonel.
La réaction des habitants est nourrie d’une opinion couramment répandue en RDC : les officiers qui se distinguent au combat et qui gagnent des batailles sont souvent rappelés à Kinshasa puis neutralisés, comme s’il y avait une volonté politique visant à faire durer le conflit entre la RD Congo et le Rwanda. La population de Goma craignait que le célèbre colonel soit sur le point de subir le même sort que le général Mbuza Mabe.
En effet, cet ancien officier de carrière des FARDC l’homme de Bukavu, s’est rendu célèbre pour avoir sauvé la ville de Bukavu en 2004, contre des troupes commandées par le général Laurent Nkunda et le colonel Jules Mutebutsi qui assiégeaient la ville. Après ses exploits à Bukavu, le général Félix Mbuza Mabe fut rappelé par Kinshasa et envoyé sur la base de Kitona. Il mourut en 2009 à Johannesburg des suites d’une longue maladie, probablement due à un empoisonnement.
Le tournant
La guerre va connaître un tournant décisif fin août 2013, lorsque des obus de M23 sont lancés sur la ville de Goma. Les FARDC, appuyée par la brigade d’intervention de la Monusco, lancent une offensive musclée qui va conduir les troupes de Mamadu Ndala à son plus grand effort armé, la reconquête de « trois antennes » dans le secteur de Kibati. La bataille de Kibati cause de lourdes pertes au M23, qui abandonne derrière lui une grande quantité de munitions.
Après Kibumba, Kiwanja et Rutshuru-centre, les FARDC s’emparent de la base de Rumangabo le 28 octobre 2013.
Les victoires des FARDC s’enchaînent jusqu’à la reprise de Bunagana, le 30 octobre 2013. Le colonel Mamadou Ndala rentre triomphalement dans la ville. Dans la foulée, Martin Kobler, le patron de la Monusco annonce la fin du M23 en tant que force militaire.
Les victoires des FARDC se poursuivront jusqu’au 30 octobre 2013, date de la reprise de Bunagana. Le colonel Mamadu Ndala rentre triomphalement dans la ville ; et Martin Kobler, chef de la Monusco, annonce la fin du groupe armé M23 soutenu par le Rwanda.
Bilan
Les combats entre les FARDC et le M23 auront ont coûté la vie à plus de 900 combattants selon les autorités congolaises. « Depuis le 20 mai et jusqu’au 5 novembre, les FARDC ont eu 201 morts et 680 blessés. Du côté du M23, il y a eu 721 morts et 543 capturés, dont 72 Rwandais et 28 Ougandais », avait déclaré le général Jean-Lucien Bahuma, commandant de la 8e région militaire, qui comprend la province du Nord-Kivu, théâtre des combats. Trois casques bleus de la mission de l’ONU ont également été tués.
La dernière mission
Conformément à la résolution 2098 (2013) du Conseil de sécurité de l’ONU, les opérations de neutralisation de tous les groupes armés doivent se poursuivre.
Ainsi, le colonel Mamadu Ndala est envoyé au nord du Nord Kivu, sur le territoire de Beni, où un groupe armé violent, ADF-Nalu, et connu pour plusieurs exactions, dont des enlèvements de civils (plus de 600 en trois ans)) et des massacres, règne en maitre. Le colonel Ndala s’engage devant les habitants de traquer ces anarchistes même sous l’eau.
Les troupes de l’armée congolaise, sous son commandement, avait sécurisé le secteur et repris la cité de Kamango qui était tombée, le 25 décembre 2013, entre les mains des combattants venus d’Ouganda. Il s’apprêtait ainsi à lancer une offensive générale pour liquider les ADF-Nalu. Les unités de l’armée étaient rangées en ordre de bataille.
Tard dans la matinée du 2 janvier 2014, le colonel Mamadu Ndala et son escorte quittent l’hôtel Albertine de Beni-Boikene pour Eringetti (54 km de Beni) dans une jeep munie d’une mitrailleuse lourde. Le convoi tombe dans une embuscade près du village de Ngadi (à environ 10 km de Beni). Un missile RPG7 frappe l’avant du 4×4 transportant le colonel Mamadu Ndala et trois de ses gardes du corps, dont une femme soldat (nommée Edith). Aucune personne à bord ne survit.
Enquête, Procès et verdict
L’enquête initiée écarte rapidement la possibilité d’une embuscade tendue par les rebelles ougandais ADF-Nalu, pour s’orienter sur la piste d’un règlement de comptes internes à l’armée. Un des gardes du corps du colonel, Paul Safari, rescapé de l’embuscade, décrit les assaillants comme portant des uniformes de l’armée congolaise et parlant kinyarwanda et lingala. C’est ainsi que l’hypothèse de l’assassinat du colonel se dessine et se propage. La Monusco indique qu’elle était disposée à participer aux enquêtes si les autorités congolaises lui en font la demande.
Les enquêteurs privilégient la piste des soldats issus des rébellions tutsies proche de Kigali et Kampala et qui avaient été intégrés dans les rangs de l’armée nationale. Ils en veulent parmi les preuves, la joie manifesté dans un message envoyé de Kampala par un ancien chef militaire du M23, Sultani Makenga, à un journaliste de Beni : « Eh ça va garçon, Votre colonel qui m’a chassé, croyait qu’il était plus fort que nous. Où est-il aujourd’hui ? Cher ami, vous devez savoir que nous avons des réseaux partout ».
Le lieutenant-colonel Tito Bizuru, ancien cadre du CNDP de Laurent Nkunda, l’ancêtre du M23, ainsi que son garde du corps, ont été arrêtés. Un autre suspect, le général Moundos, proche de Joseph Kabila, a été également interpellé, puis laissé libre et nommé second de l’opération Sokola contre les ADF-Nalu.
Le procès des accusés du meurtre du colonel Mamadou Ndala s’ouvre près de neuf mois jour pour jour à la Cour opérationnelle militaire du Nord-Kivu. Vingt personnes au total sont jugées depuis le mercredi 1 octobre par la cour, qui s’était déplacée à Beni pour l’occasion.
La cour opérationnelle militaire du Nord-Kivu est arrivée à la conclusion que la mort de Ndala avait été planifiée par des militaires congolais et exécutée par des rebelles ougandais des ADF-Nalu, installés en RDC depuis 1995. Lundi 17 novembre, le lieutenant-colonel congolais Birocho Nzanzu et quatre rebelles ougandais sont condamnés à mort pour l’assassinat du colonel Mamadou Ndala. Nzanzu est accusé d’avoir servi d’intermédiaire entre l’armée congolaise et les rebelles ougandais.
Symbole
Le colonel Mamadu Dara est depuis perçu et présenté comme une vrai patriote congolais, un héros à l’instar de Patrice Emery Lumumba.
Lncd/PersonnagesCd