Conférence des Gouverneurs : Le changement de ton… et de cap
La salle des congrès du Palais de la Nation à Kinshasa a servi de cadre, au lancement ce lundi 28 Décembre par le Président Tshisekedi, de la 7ème Conférence des Gouverneurs des provinces. Tous les gouverneurs des 26 provinces que compte la RDC ont répondu présent à ce deuxième rendez-vous du genre sous la présidence Tshisekedi. Un événement qui intervient dans un contexte politique et institutionnel où Félix Tshisekedi devient pratiquement le seul maître à bord, après avoir mis fin à la coalition Fcc-Cach, et qu’il soit en passe de récupérer la majorité parlementaire. Une posture très avantageuse qui a clairement transparu dans le discours d’ouverture prononcé par le Chef de l’Etat congolais.
Photo de famille à l’occasion de l’ouverture de la Conférence des Gouverneurs 2020
« La gouvernance des provinces dans l’environnement démocratique actuel : défis et opportunités », c’est le thème retenu pour ces assises prévues du 28 au 29 Décembre 2020.
Dans son discours d’orientation, le Chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo a donné une série de réflexions qui devraient faire l’objet d’examens en commissions.
Premièrement elle concerne la revisitation des objectifs fondamentaux des règles et mécanismes de fonctionnement du pouvoir exécutif national et des provinces dans un environnent atypique tout en préservant les acquis de l’alternance de 2018.
Deuxièmement elle touche les pratiques actuelles de la gouvernance des provinces au regard des principes fondamentaux qui fondent l’État et ceux relatifs à la libre administration des provinces.
Et en troisièmement lieu, Tshisekedi veut pousser la réflexion sur les défis actuels auxquels sont confrontées les provinces et qui empêchent leur fonctionnement optimal tout en freinant leur développement efficient. Il s’agit entre autre du transfert des compétences, la mobilisation des ressources provinciales, des mesures contre la Covid-19, la lutte contre la corruption et le détournement et les autres antivaleurs.
Une série des réformes institutionnelles en faveur des provinces a également fait l’objet d’annonce dans le discours de Tshisekedi, qui a aussi affirmé à ses hôtes avoir tenu compte des recommandations faites par les Gouverneurs des provinces lors des consultations présidentielles.
Les gouverneurs à la fois avertis, rassurés et orientés
Le discours de Tshisekedi prononcé à cette occasion a contenu autant d’avertissements à l’endroit gouverneurs que des assurances, sans oublier des orientations. Le tout destiné clairement à poser les bases d’une nouvelle ère dans les relations entre le Chef de l’Etat congolais et ses différents représentants dans les provinces. Quelques extraits ci-dessous rassemblés pour cela.
« Les actes de sabotage des nouvelles politiques publiques que je compte impulser pour le reste de mon quinquennat, ne seront ni tolérés ni impunis. Désormais, la mise en œuvre de mon programme et ceux des gouvernements provinciaux sera suivie et évaluée trimestriellement afin de nous assurer que nos politiques publiques retenues et planifiées dans les différents secteurs de la vie nationale, améliorent les conditions de vie de notre peuple… A ce titre, est notamment interdite toute participation d’un Gouverneur de province à toute entreprise susceptible de mettre en danger, de suspendre ou d’interrompre dans notre pays l’Etat de droit, son indépendance, sa souveraineté, son unité, son indivisibilité, son caractère social, démocratique et laïc, notamment par la mise en place de ses propres forces de défense nationale ou de sûreté extérieure. C’est ainsi que sera sanctionnée avec sévérité toute tentative de déstabilisation de l’unité du pays à partir d’une gouvernance provinciale quelle qu’elle soit… L’Union Sacrée de la Nation se veut justement, comme vous l’avez suggéré, de sécuriser, dans le respect de la Constitution et des lois de la République, la fonction de gouverneur de province, représentant de la haute autorité en province, contre les diverses velléités infondées de déstabilisation par les députés provinciaux, dans le but d’assurer la stabilité des institutions provinciales en vue de booster le développement à la base… le peuple congolais est fatigué des discours politiques. Il tient à la réalisation de son bien-être par une politique volontariste qui tient compte de ses aspirations au progrès social… nous nous devons, en sus des demandes spécifiques déjà énoncées, de raffermir notre démocratie, de consolider l’Etat de droit et la bonne gouvernance, de procéder à la relance de la construction des infrastructures publiques de notre pays. Nous devons abandonner les pratiques honteuses de corruption et de détournement des deniers publics qui retiennent le décollage de notre pays ».
Neuf suggestions de Ngobila au nom de tous les Gouverneurs
Intervenant en qualité de président du collectif des Gouverneurs de Province, Gentiny Ngobila a formulé neuf suggestions ci-dessous, qui seront développées pendant les travaux.
Le Gouverneur de Kinshasa Gentiny Ngobila lors de son speech au nom de tous ses paires
« Premièrement, La tenue trimestrielle et rotative de la Conférence des Gouverneurs de Province dans le respect scrupuleux des dispositions pertinentes de l’article 200 de la Constitution et des articles 6, 9, 10, 11 et 12 de la précitée Loi Organique relatives notamment à la régularité de sa tenue, aux Membres nommément et limitativement désignés pour y participer, à son organisation et à son fonctionnement.
Deuxièmement, Le rétablissement de l’ordre institutionnel légal dans les Provinces où les Gouverneurs ont été irrégulièrement et illégalement demis de leurs fonctions par Message Officiel du Gouvernement de la République à l’occasion du vote d’une motion de censure ou de défiance ;
Troisièmement, Compléter l’article 42 de la Loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des Provinces en y insérant un quatrième et dernier alinéa relatif au moratoire formulé en ces termes : « Il ne peut être présenté de motion de défiance contre un Membre du gouvernement Provincial ou de censure contre le Gouvernement Provincial avant dix-huit mois depuis leur investiture ».
Quatrièmement, rendre effectif la retenue à la source sur les recettes à caractère national les frais de fonctionnement des Institutions Provinciales.
Cinquièmement, rendre effectif le fonctionnement de la caisse Nationale de Péréquation tout en revisitant son mode de fonctionnement qui fait de cet établissement public juge et gestionnaire des projets et des programmes d’investissements publics en Province.
Sixièmement, veiller à la mise en application effective des dispositions des articles 19, 138, 146, 147, 198 de la Constitution et 39, 41 et 42 de la Loi portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des Provinces sur l’exercice obligatoire et préalable des moyens d’information et de contrôle parlementaire avant toute initiative de motion.
Septièmement, procéder au paiement régulier des frais de fonctionnement des Assemblées Provinciales et rendre égalitaire les émoluments des Députés Provinciaux de la République.
Huitièmement, la mise en œuvre efficiente des allocations aux Provinces sur les lignes budgétaires pour les investissements principalement dans le secteur des infrastructures ainsi que la diversification de l’économie nationale.
Neuvièmement, rendre effective la décentralisation conformément à la Constitution en réduisant les services et les prérogatives au niveau du pouvoir central. »
A noter qu’après leur ouverture, les travaux se sont poursuivis après-midi à huis clos. Sous la conduite du président de la République, chacun des 26 gouverneurs devait présenter l’état des lieux de son entité.
Pour rappel, la complexité des règles et mécanismes de fonctionnement entre le pouvoir central et la province et entre les provinces elles-mêmes a inspiré le constituant à instaurer la conférence des Gouverneurs comme cadre de concertation régulière entre ces deux niveaux de pouvoir étatique.
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