M23 : Les déclarations d’António Gutteres vues d’un autre œil…
La dernière sortie médiatique du Secrétaire général de l’Organisation des Nations-Unies, ONU, sur la situation sécuritaire préoccupante à l’Est de la République démocratique du Congo, RDC, continue d’alimenter les polémiques. Le fait d’avouer l’impuissance de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo, MONUSCO, face aux rebelles du M23 à la solde du Rwanda, est d’autant plus une déclaration à prendre au sérieux qu’elle émane du patron de l’institution mondiale basée à New York aux Etats-Unis. Vu d’un autre angle, les propos tenus par Gutteres peuvent bien être dénués de toute innocence.
« Le fait est que les Nations unies ne sont pas capables de battre le M23. La vérité, c’est que le M23 aujourd’hui est une armée moderne, avec des équipements lourds qui sont plus perfectionnés que les équipements de la MONUSCO », déclaré le SG de l’ONU le 18 septembre dernier, dans une sortie médiatique précédant l’ouverture de la 77ème Assemblée générale de l’ONU à New-York. Des propos qui sonnent comme un aveu d’échec cuisant et qui posent en même temps la problématique de l’efficacité des troupes onusiennes engagées en RDC depuis plus d’une décennie. Car, il y a des raisons de croire que de sa position de Secrétaire général de l’ONU, le dirigeant portugais sait de quoi il parle.
Mais si dans le fond, cette déclaration du patron de l’ONU, peut être lue comme une preuve de pragmatisme et de réalisme face à la réalité du terrain, ce qui ne manque pas d’intriguer, c’est la forme qu’elle a prise, par cet aveu public de faiblesse de la force internationale devant ces rebelles congolais soutenus par Kigali que la même MONUSCO a pourtant déjà contraints au dépôt des armes et à rentrer dans les rangs, il y a de cela moins de 10 ans.
Comment se fait-il alors que moins de 10 ans après sa défaite, cette même rébellion ait pu renaître de ses cendres, reprendre du poil de la bête et se renforcer militairement au point de devenir une armée moderne dotée d’une force de frappe supérieure à celle des soldats onusiens ? Comment cela a-t-il pu se passer au nez notamment de la Force de l’ONU présente dans la région depuis tant d’années ? Et puis, pour un sujet aussi sensible, qui touche à la sécurité des populations et qui pourrait même toucher à la sûreté de l’Etat congolais, avait-on vraiment besoin d’étaler cette impuissance de la MONUSCO sur la place publique ? Rien n’est moins sûr.
D’autant qu’en plus des cercles restreints de la diplomatie souterraine où le sujet aurait pu être évoqué discrètement en vue d’y trouver une solution, la guerre a aussi son aspect psychologique qui peut booster ou casser le mental des combattants, selon le camp dans lequel on se trouve. Et dans le cas d’espèce, s’il n’y a pas de doute que c’est une information qui pourrait galvaniser davantage le M23, il est à craindre qu’elle ne contribue à scier le moral des soldats de la paix et au-delà de militaires congolais engagés au front dans la défense de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de leur pays. Sur cet angle, pas d’équivoque possible. Des analystes sont aussi formels…
Dans son speech prononcé le mardi 20 septembre 2022 du haut de la Tribune de la 77ème Assemblée générale des Nations-Unies, le chef de l’Etat Congolais Félix Tshisekedi a semblé, d’après un analyste, donner du répondant à l’attitude controversée du SG de l’ONU : « Ni l’indifférence, ni l’immobilisme, ni l’attentisme ne sont admissibles de la part de l’ONU face à la menace contre la paix et la sécurité internationale (…) ».
Peut-être aussi que cette sortie médiatique aux propos décriés d’António Gutteres est une manière voilée de demander plus de moyens pour la MONUSCO, pour rééditer l’exploit de 2013 contre le M23… Et permettre une sortie honorable des casques-bleus de la Rdc…