Zoom sur le Sport : « L’arrivée de Sama Lukonde est une chance pour les sportifs congolais » déclare Herman Mbonyo (A bâton rompu suite et fin)

Le vendredi 12 Mars dernier, nous vous avons livré la première partie de l’entretien exclusif  qu’Herman Mbonyo Lihumba, personnalité bien connue, a accordé à votre média. Dans la présente et dernière livraison de cette interview, ce dirigeant sportif qui est aussi connu pour n’avoir pas sa langue dans sa poche, n’a pas raté l’occasion comme dans la première partie, pour dénoncer de maux qui tuent le sport congolais. Il veut toutefois croire à un changement possible pour de raisons qu’il a aussi bien évoquées.

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Ancien Secrétaire Général du Comité olympique congolais, COC, et actuellement Président de la fédération congolaise de rugby, Fecorugby, Herman Mbonyo est aussi Membre du comité exécutif d’Afrique de rugby et Président de la commission académie de rugby Afrique et en charge de la formation et des compétitions jusqu’à 20 ans. C’est en effet sous ces différentes étiquettes, que ce « diable en personne » pour les uns, et « visionnaire hors-paire » pour les autres, s’est exprimé. Pour cette suite, nous avons pris soin de commencer par le dernier volet de cet entretien publié précédemment.  

Herman Mbonyo avec le Président du Comité d’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024 et ancien Président de World Rugby

Le problème !

Le sport congolais va mal. Herman Mboyo qui ne s’en cache pas, crache ici de maux qu’il croit être à la base des contre-performances de la Rdc sur le plan sportif.

« Je suis à mon troisième mandat de 4 ans à la tête de la fédération congolaise de rugby, Fecorugby. Sans peur d’être contredit, je peux affirmer que nous avons un très grand potentiel. Malheureusement qu’au pays on ne nous comprend pas, nous avons eu que peu de chance avec les ministres de tutelle successifs. Depuis 2012 que je suis à la tête du rugby congolais, je ne peux citer les noms que de deux ministres des Sports qui se sont intéressés au rugby : Denis Kambay et avant lui Sama Lukonde. Ils ont compris c’était quoi le rugby et comment on pouvait travailler ensemble. Malheureusement ils avaient un premier ministre à l’époque qui leur avait contraint de ne pas financer d’autres disciplines que les quatre qu’il avait retenues lui-même pour des raisons incompréhensibles. Ce qu’on peut dire et que ce chef du gouvernement central était mal conseillé, par un fameux conseiller financier du ministre qui finira lui-même ministre. Comment comprendre que dans un pays si grand démographiquement avec autant des sportifs, seuls quatre sports peuvent être retenus ? Une politique entretenue durant des années et qui a contribué à tuer le sport congolais.

J’ai été un des premiers lanceurs d’alerte dans le monde du sport congolais, en dénonçant clairement comment le sport congolais va mal. Sinon, comment comprendre que depuis 1963 qu’existe le comité olympique congolais, le pays n’a produit aucun champion olympique ? Sinon, comment comprendre que des fédérations soient payées de main à la main, sur des montants de voyages, avec des sommes aussi importantes, cela en catimini et dans la nuit tombée, sans reçu, sans traçabilité, le fameux phénomène « Maboko banque » ? Alors que chaque année l’Etat congolais dépense près de 18 millions de dollars américains. Il y a des gros soucis quand-même dans la gestion du sport congolais qui fait qu’on néglige certaines disciplines. Mais où va tout l’argent que l’Etat investi dans le sport ?

Il se fait que les disciplines qui sont négligées sont plus porteuses d’espoirs que les autres. On a tout fait avec le Football, mais quel en est les résultats ? On est entrain de tout faire avec le Hand-ball, j’ai même appris que la sélection féminine irait en stage en France, mais qu’a fait l’équipe masculine dernièrement en Egypte ? On dirait qu’on n’apprend pas de nos erreurs. Alors que il y a par exemple la Boxe, le Tae-Kwondo, le Volley-Ball qui ont déjà apporté de bons résultats. Avec le rugby de moins de 16 ans, nous avons battu l’Algérie en Algérie…  Voilà concrètement des disciplines qu’il faut aider. Quelque part, il se dégage un manque de vision globale du sport. Les ministres comme Sama Lukonde ou Denis Kambayi à l’époque, ont su faire montre d’une vision globale, malheureusement ils étaient tombés dans des équipes gouvernementales avec des premiers ministres qui ne les avaient pas compris. Qu’à cela ne tienne. L’essentiel est que nous avons du potentiel pour faire quelque chose de grand tant sur l’échiquier africain que mondial.

Savoir reconnaître les mérites des citoyens

Herman Mbonyo estime que les Congolais qui sont bien considérés sur l’échiquier continental ou mondial ne bénéficient pas toujours de mêmes égards au pays, alors que c’est parfois au nom de la Rdc qu’ils ont tous ces galons.  

Le travail que nous faisons ici dans notre pays est reconnu ailleurs. Je prends l’exemple de moi qui vous parle. Je suis membre du conseil exécutif de l’instance africaine de rugby, Président de la commission académie de rugby Afrique et responsable de la formation et des compétitions jusqu’à 20 ans … je suis congolais. On m’a choisi parce qu’on a vu le gros du travail que nous avons réalisé avec mon équipe dans notre pays, nous avons été leader dans beaucoup des sujets, notamment sur la Femme. Souvenez-vous, nous avons pris une formation pour les journalistes pour le rugby, tout cela a été un bel exemple au niveau de l’Afrique. Il y a encore plein d’autres choses. Ce qui a permis que je sois retenu aujourd’hui dans les fonctions africaines, c’est le cas de dire qu’on fait confiance à la Rdc. Il faut aussi que la Rdc d’où nous venons nous fasse confiance.

Ce qui est déplorable est qu’on se permette de recevoir quelqu’un à la télé comme président a.i. de la Fecorugby. Avez-vous déjà vu un président a.i. de la Fecofa, malgré que Costant Omari passe un long temps à l’étranger dans le cadre de ses responsabilités internationales comme aussi c’est mon cas ? Ca n’existe pas dans les statuts de nos associations cette histoire de président a.i.. Il y a des choses qu’on tolère dans le Sport congolais qui n’en valent pas la peine. Et c’est bien dommage !

Sama Lukonde connaît la petite mafia qui caractérise le Sport congolais

Denis Kambayi et Sama Lukondo sont deux anciens ministres de Sport qu’Herman Mbonyo reconnait avoir eu une vision globale du Sport avec des actions concrètes. Le Rugby, discipline qu’il préside, a même vu le ministre de tutelle à l’époque, Sama Lukonde, se déplacer jusqu’au stade Tata Raphaël aux installations de rugby. Ce qui était une grande première. Et, aujourd’hui Sama Lukonde est Premier ministre de la Rdc. A croire, suite au précédent, que cela constitue une aubaine pour le rugby congolais.

Je peux dire que l’arrivée l’ancien ministre des Sports de Sama Lukonde à la tête du Gouvernement est une chance pour les sportifs congolais. C’est une personne intègre et honnête, il connaît bien la petite maffia qui rode autour du sport congolais. Parce que cette même maffia s’amuse aujourd’hui à faire courir de bruits sur une histoire des voitures. Il y a un monsieur très bien connu de tous par l’opinion qui s’était amusé à ce petit jeu d’aller offrir à l’époque un véhicule au ministre des Sports qu’était Sama Lukonde que ce dernier a refusé.

C’est pour dire que nous avons aujourd’hui à faire à un Premier ministre qui connaît les mauvaises pratiques qui existent dans le monde du Sport congolais, il a eu la chance d’être ouvert au monde durant toute sa carrière, il a eu à être actif dans les activités sportives alors aux études. C’est donc quelqu’un qui connaît ce monde-là. C’est un atout pour la Jeunesse congolaise d’espérer voir le sport aller de l’avant. Et le jour où le sport ira de l’avant, soyez en certains que la Rdc ira un peu mieux.

Herman Mbonyo en bleu et Sama Lukonde en chemise pagne alors ministre des Sports, à l’occasion d’un match international de rugby au stade Tata Raphaël à Kinshasa

Je garde encore frais le souvenir du ministre des Sports Sama Lukonde à l’époque, qui s’était déplacé jusqu’au stade Tata Raphaél pour soutenir la sélection nationale de Rugby jouant contre le Rwanda dans le cadre de la Coupe d’Afrique de la discipline. C’est inédit surtout que ce n’était pas le football. De quoi voir les qualités de dépassement dans cet homme que personne ne pouvait encore imaginer à l’époque qu’il deviendra Premier ministre. La confiance qu’il jouit auprès du Président de la République qui l’a nommé à ce poste, c’est aussi parce qu’il a toutes ces qualités là.

Je peux encore dire plus. Moi je suis un ancien de l’institut Tumba qui se trouve à Lukala dans le Kongo-Central. Nous avons eu un gardien de but à l’école qui s’appelait Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, très apprécié de tous, le Chef de l’Etat actuel. C’est un sportif, il aime bien le Sport, et ça, tous les anciens de Tumba le savent. Je ne crois pas qu’il se laissera raconter des sornettes dans ce domaine. Encore un paramètre qui a de quoi donner de l’espoir pour le Sport national.

Le mouvement sportif et le choix du ministre des Sports

Lors des consultations menées par le Premier ministre Sama Lukonde en vue de la constitution de son Gouvernement, il a été dit que le mouvement sportif voulait influencer le choix du ministre des Sports. Une démarche qu’Herman Mbonyo a du mal à comprendre.

Depuis quand est-ce que le mouvement sportif décide de ce qui doit être le ministre des Sports ? Celui qui est le ministre sortant a-t-il été proposé par le mouvement sportif pour le devenir ? C’est non ! Tant pour la fois précédente que les fois passées. C’est mal de connaître l’homme Sama Lukonde en cherchant à l’influencer ainsi. Ce qui est vrai est qu’il n’existe pas un seul mouvement sportif. Les gens ne doivent pas détourner ces structures en s’auto-désignant et s’en servir pour des causes égoïstes. C’est une grosse erreur que de faire les choses comme ça. Le Sport c’est quand même la performance, les résultats. Alors si on ne dénonce pas de telles pratiques corrompues qui font mal, le sport congolais  continuera à souffrir.

Nécessité impérieuse d’avoir des dirigeants sportifs qui aiment vraiment le Sport

La pratique et la gestion du sport demande beaucoup de sérieux et d’amour, soutient Herman Mbonyo. L’occasion pour lui d’expliquer la réalité des sports intuitifs et des sports techniques pour illustrer cela.

Il n’y a pas que le football comme sport pour qu’on lui consacre toute l’attention et négliger les autres. Le football est un sport totalement intuitif. Testez Un gamin quand tu lui donnes un ballon, il va le taper en avant. Mais si vous prenez le rugby, il faut l’apprendre. Aucun gamin, faites en l’expérience avec vos enfants, vous leur donnez le ballon, ils ne vont pas commencer à se donner des passes en arrière. Ce n’est pas intuitif donc ça s’apprend. De même qu’avec le basket-ball, un enfant spontanément ne sait pas que s’il marche avec le ballon on va le sanctionner. Donc, il y a de sports qui sont véritablement techniques, c’est presqu’une science, il faut l’apprendre. Cela demande des moyens, d’investissements.

Pour cela, nous avons besoin des dirigeants sportifs qui comprennent l’investissement qu’on fait. Sinon, on vivra des scènes  comme à l’époque où, lors des jeux africains de la Jeunesse, de responsables du sport s’étaient permis d’envoyer des enfants avec des billets aller simple sans s’assurer de leur retour. Ces derniers sont restés en Algérie douze jours entrain pratiquement de quémander jusqu’à finir à se nourrir que de la sucrerie et du pain. C’est tout le contraire d’un responsable sportif, c’est vraiment tout le contraire d’aimer le Sport.

D’autres scènes que nous avons vécues, où on voit quelqu’un venu du pays débarquer dans le village olympique avec une mallette pleine d’argent, envoyer expressément pour « distribuer » l’argent aux athlètes et aux membres de la délégation, il y a à se poser de questions. Surtout que l’homme en question n’est pas ni le trésorier du Comité olympique congolais, ni le comptable du ministère des Sports, et surtout comment a-t-il pu traverser la douane avec autant d’argent liquide évalué à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Donc des pratiques à décrier. Tout le monde connait mais tout le monde fait semblant.

Ca fait plusieurs années qu’il n‘y a plus des bons résultats au niveau du sport congolais à cause de gens qui s’évertuent de tuer les choses à ce niveau. Et il est du devoir de tout patriote de les dénoncer, car trop c’est trop. Nous avons tous appelé le changement de tous nos vœux, alors changeons.

Je suis d’avis qu’avec un Chef de l’Etat dont on reconnaît  la passion du sport, c’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour le pays.

Dans ce long entretien où chacun peut trouver à boire et à manger, Herman Mbonyo est revenu plusieurs fois sur de pratiques peu recommandables qui sont de mises dans le monde du sport congolais, au point d’impacter négativement sur les résultats. Alors que compétir implique des performances, sans lesquelles on ne peut s’attendre à aucun bon résultat. Et comment pourra-t-on alors arriver à cela si la pratique et la gestion du sport en Rdc souffre d’une fraude caractérisée ? That is the question !

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