Félix Tshisekedi : Cette interview à l’allure d’un « dernier acte » à Goma avant le retour à Kinshasa

Le Chef de l’Etat Congolais a accordé une importante interview à la presse nationale, une première depuis qu’il est à la tête de la République démocratique du Congo, RDC. Christian Lusakweno de Top Congo Fm et Françoise Buela de la chaîne publique qui ont affronté à cet effet Félix Tshisekedi, ne l’ont pas ménagé par rapport aux questions d’actualité. De l’état de siège à l’affaire des 500 « Jeep » des députés, en passant par les dossiers de la Justice concernant Vital Kamerhe, Matata Ponyo, les relations avec le Rwanda et l’Ouganda, la vaccination anti Covid-19, etc. Et déjà, c’est la polémique dans l’opinion…

Après la publication de son interview accordée récemment au magazine Jeune Afrique ainsi qu’à son message à la Nation du 30 Juin à l’occasion du 61^ème anniversaire de l’indépendance de la Rdc, Félix Tshisekedi s’est livré à l’opinion, à travers la Presse nationale cette fois-ci. Nous revenons ici sur certains points de cette interview longtemps réclamée.

De la corruption

« Il y a quelque chose que je n’avais jamais soupçonné en arrivant au pouvoir : l’ampleur de la corruption. C’est criminel. C’est incroyable, cette méchanceté. Aucun amour pour ce pays. Elle est terrible, cette corruption. C’est pire même d’avoir tué quelqu’un. C’est devenu un système. On ne peut imaginer que les êtres humains peuvent être aussi prédateurs »

De la Justice

« Je ne suis pas satisfait du rendement (de la justice, pilier de l’État de droit) actuellement. On n’a pas encore des résultats escomptés. Peut-être qu’il faut mieux rémunérer ces gens-là. Par exemple, sur le foncier, il y a des scandales. Je ne suis pas juge. Je n’ai pas à leur dire ce qu’ils doivent faire. Je constate… il y a eu dans mon entourage, je crois qu’il y en a encore des gens qui ont tenté d’influencer les juges. J’ai dit aux juges, le prochain qui viendra, arrêtez le pour trafic d’influence. Je veux que la justice soit indépendante, ce bras séculier pour instaurer l’État de droit ».

De l’Armée

« S’il y a un secteur en Rdc où on trouve encore de patriotes, c’est l’Armée… L’état de siège c’est pour rétablir la paix et la sécurité mais aussi la stabilité dans le Nord-Kivu et l’Ituri… »

Du jugement des autres sur le social

« C’est un procès injuste qu’on nous fait. En arrivant au pouvoir, aucun dirigeant n’a une baguette magique pour changer le social de sa population. Ce pays n’a pas commencé à mal aller avec l’arrivée de Félix Tshisekedi au pouvoir. 4 millions d’enfants en plus sont maintenant scolarisés grâce à la gratuité de l’Enseignement. Une disposition constitutionnelle qui n’a jamais été appliquée avant nous. Après la gratuité de l’Enseignement, nous travaillons pour la gratuité de l’accès aux soins de Santé ».

De l’IGF et de l’APLC

« L’IGF et l’APLC, malgré les petits problèmes de cette dernière qui sont déjà arrangées, mais je ne suis pas content ni satisfait du rendement des gens que j’ai nommés ».

De Vital Kamerhe

« Vital Kamerhe, c’est mon frère. Je suis totalement désolé et affecté de ce qui lui arrive. Je ne l’ai pas voulu. Contrairement à ce que certains dires de mal intentionnés…On peut me condamner, je peux accepter, de n’avoir pas donné des injonctions pour que la justice ne fasse pas son travail et qu’il ne se retrouve dans cette situation. J’ai laissé la justice libre de faire son travail. continue à croire que Vital Kamerhe est quelqu’un d’honnête et de sérieux dont la République a besoin, grâce à son intelligence et à son expérience. Il a un rôle à jouer dans ce pays. Et il jouera un rôle dans ce pays ».

Du dossier Matata Ponyo à la Justice

« Il ne faut pas que l’ancien Premier ministre Matata Ponyo pense que je lui en veux, c’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup. Je ne comprends pas qu’il y a cette catégorie des Congolais justiciables et ceux qui peuvent s’extirper de la justice. Même pour lui, Augustin Matata, cela ne lui est pas profitable ».

Des relations avec le Rwanda et l’Ouganda

« La guerre elle est mauvaise et nocive pour tous les secteurs de la vie…Je ne vois pas comment on peut obtenir justice et réparation en continuant à traiter Paul Kagame et Yoweri Museveni de loups et d’agresseurs. La rancune, la haine, ça ne sert à rien. Je crois qu’il faut savoir tirer un trait sur tout ça et regarder ce qui y a de positif… Je n’ai pas dit qu’on ferme les dossiers judiciaires, mais je crois qu’il faut d’abord mettre nos populations en sécurité, rassurer les pays voisins avant d’ouvrir un quelconque dossier judiciaire dont le rapport Mapping »

Des Mesures de grâce à l’occasion du 30 Juin

« J’attends les propositions des noms de la ministre de la Justice pour accorder ces mesures ».

De la vaccination anti Covid-19 avec AstraZeneca

« Je n’ai pas eu tort en parlant d’AstraZeneca… il y a un problème avec ce vaccin… Il y a eu 4 décès au Rwanda des personnes qui étaient déjà vaccinés avec AstraZeneca mais contaminées de nouveau après… Les prochains vaccins qui arriveront, vous verrez, ma femme et moi, nous allons nous faire vacciner ».

De l’affaire 500 « Jeep » des députés

« Comment voulez-vous corrompre 500 députés ? C’est 500 jeeps qui ont été commandées, ça veut dire que même l’opposition aussi, je vais la corrompre ? Ça n’a pas de sens Ils vont payer ces jeeps à leurs frais. Il n’y a pas de crédit. L’Assemblée nationale a une certaine autonomie financière. Ils ont le droit de prendre langue avec les constructeurs automobiles pour faire de montage… D’ailleurs, réfléchissez bien, vous verrez que ce problème ou ce scandale est intervenu au moment où on parlait des cartes de crédit à la Banque centrale tirées sur Trésor, n’est-ce pas ? Et donc, ça arrangeait les gens à faire plus de bruits avec cette affaire pour étouffer l’autre. C’est simplement ça ! … J’ai souhaité mettre les députés dans les meilleures conditions pour bien faire leur travail. Ils ont cité une série de revendications dont les véhicules parce que certains députés viennent en moto… nous allons continuer. Nous allons renforcer le rôle de nos représentants nationaux en leur allouant un budget pendant leurs vacances parlementaires. Pourquoi là on ne parle de corruption. Démocratiquement, ils ont décidé de ne pas voter la loi de l’habilitation, alors que j’avais un autre avis. C’est la démocratie que je veux. Le président n’est pas un surhomme ».

De son salaire et du train de vie des institutions

« Je vous le dis très sincèrement, je suis incapable de vous dire combien je touche,  parce que ça ne m’intéresse pas. Mon salaire ne m’intéresse pas et je sais que ce  n’est pas exorbitant… Je suis pour que l’on baisse le train de vie de l’État. En ce moment d’ailleurs, j’ai donné des instructions mais ça ne dépend pas de moi, ça dépend du budget. On est en train de travailler très sérieusement à cela et en ce moment-là, je reviendrai pour vous dire au centime près de franc congolais, ce qu’est mon salaire».

Du deuxième mandat

« Cela dépendra d’abord de la volonté du peuple… Ce n’est pas parce que j’ai une vision pour ce pays et que je veux continuer que je dois me comporter comme si j’étais en campagne. Travaillons d’abord en attendant ».

Cette interview accordée le jeudi 1^er Juillet 2021 consacre apparemment le dernier acte du séjour du Président Tshisekedi dans la partie Est de la République, où il s’est installé depuis le samedi 19 Jun dernier. C’est après que de sources de la Présidence de la République, il est annoncé le retour à Kinshasa du Chef de l’Etat Congolais.